Le confinement peut aussi avoir quelques avantages. Le temps ne manque pas : on fait une pause dans nos vies à 100 à l’heure . Nous nous recentrons sur l’essentiel et nous prenons le temps de vivre.

On reste les fesses sur le canapé, je vous propose de vous faire découvrir l’un de mes coups cœurs du moment. Direction la Suisse plus exactement à Fully, pour faire la rencontre d’une cave, d’un vigneron et d’une famille.

Très attachante, la famille Valloton produit des vins remarquables, remplis de tension. À la barre nous retrouvons Henri Valloton, le vigneron et chef du domaine, nous avons également sa femme Nicole et sa fille Karen qui elles aussi œuvrent au bon fonctionnement de la cave. Que serait un homme sans ses femmes ?

Karen, la fille, une trentenaire pleine d’énergie travaille depuis plus de dix ans au sein du domaine. Elle s’occupe avec sa mère Nicole de la partie administrative, de la communication et de la vente au domaine. Forte d’idées nouvelles et modernes (utilisation de QR code sur les bouteilles, des réseaux sociaux pour développer leur communication), mère et fille sont deux brins de femmes remplies de fraîcheur et de créativité. Elles se sont lancées un défi pour le millésime 2019 et ont entièrement créé une cuvée: Effigie blanche. Plutôt sympa, non?

Henri leur a laissé carte blanche ! Elles lui ont, tout d’abord, posé des tas de questions afin de connaître toutes les possibilités qui s’offraient à elles. Entre excitation et stress, elles ont créé un vin qui leur correspond.

Attention, on parle, ici, d’une micro cuvée de 300 litres. Il s’agit d’un Sauvignon Blanc vinifié en cuve Inox . Elles voulaient seulement en tirer le meilleur, pour cela, elles ont réalisé une macération pelliculaire dans le pressoir et ont récupéré uniquement les jus des coulures.

Avec 300 litres, il n’y a que peu de risque mais pour un premier essai, cela suffit. C’est d’ailleurs ce que j’avais fait pour ma première cuvée de Muscat.

Elles ont laissé libre cours à leur imagination. Le plus touchant et le plus drôle, c’est quand elles vous parlent avec ardeur de la manière dont elles ont dorloté leur petite Effigie. Cette cuvée a animé leurs discussions et elles ont parfois eu des désaccords. Karen voulait faire un passage en barrique quand sa mère n’en voulait pas. Qui a eu gain de cause, d’après vous ? Nicole… et elle a bien fait. La fraîcheur et la tension sont justement superbes dans ce vin. Elles ont seulement réalisé de nombreux battonages pour atténuer l’acidité des débuts et assouplir le vin. Elles lui ont apporté volume et complexité.

Fières de leur cuvée, Effigie blanche, on peut dire qu’elles ont réalisé un super travail et leur joie de vivre est contagieuse. Attention, vous êtes prévenus. Une petite nouveauté que l’on n’attendait pas et qui fait plaisir !

Revenons à Henri, le vigneron.

Avez-vous déjà aperçu ses bouteilles ?

Elles ont des étiquettes simples et reconnaissables. On y retrouve le Chavalard et la Grand Garde qui donne une vue depuis Martigny. Chaque cuvée est écrite par Henri qui attache un soin particulier à y déposer sa propre écriture. On notera déjà son âme d’artiste, son coté perfectionniste et proche de ses clients jusqu’à l’étiquette.

Nous sommes donc à Fully, haut lieu de la Petite Arvine, dans la région du Valais,en Suisse. La cave s’étend sur un peu plus de 9 hectares de vigne dont 2,9 hectares en propriété sur les appellations Fully, Saillon, Saxon et Martigny. Henri ne souhaite pas aller au-delà de cette superficie afin de garder sa cave à échelle humaine. Il produit environ 80’000 bouteilles par année. Cela reste peu quand on compare aux domaines français mais comparons ce qui est comparable. Les domaines suisses sont beaucoup plus petits et son domaine fait néanmoins partie des caves de taille moyenne.

Il souhaite continuer à s’occuper et démarcher les clients lui-même. Ne serait-ce pas là la clé de son succès? Qui n’est mieux placé pour parler de ses vins que lui et c’est ce que ses clients apprécient : la proximité du vigneron.

Henri est à la fois observateur et un charmant bavard qui arrive très bien à cerner les gens qu’il côtoie. M’a-t-il percé à jour? Dites vous, il fait partie de cette catégorie de vigneron à avoir révolutionné la viticulture en Suisse afin de produire des vins de qualité. Il a fait ses études avec Marie-Thérèse Chappaz pour ne citer qu’elle.

Comment a commencé cette passion ? Une évidence pour lui !

Il fait partie de la troisième génération de vigneron de la famille. Le domaine a été créé en 1924 par son arrière grand-père Oswald Valloton puis son père a repris les rênes. Après un CFC viticulture et l’école d’oenologie de Changins, il rejoindra son père et reprendra le domaine en 2000.

Son Slogan « Moins on touche, Mieux on se porte. »

Henri a toujours souhaité faire des vins parcellaires avec des cépages en adéquation avec les différents terroirs. Fully, connu pour ses sols granitiques, permet d’obtenir de merveilleuses Petite Arvine avec beaucoup de tension. Tout ce qu’il aime !

Il souhaite vraiment laisser s’exprimer le Terroir et agir le moins possible sur les vins. Il met l’accent sur la vigne et utilise des méthodes plus respectueuses de l’environnement. Il n’utilise plus d’herbicide. Il laisse parler le biotope naturel comme des hysopes qui sont bien particulièrement connus pour stimuler la croissance de la vigne et les plantes aromatiques qu’il laisse pousser sur les allées pour maintenir les pentes vertigineuses de Fully.

Il produit des vins qui vivent dans la durée, sans aucun collage. Il veut que ses vins puissent exprimer leur caractère et le Terroir qui les a vu naître. Une belle façon de ne pas s’ennuyer à chaque dégustation!

Vous ne le savez peut-être pas mais la réputation de Henri Valloton n’est plus à faire en Suisse. Homme d’action, il consacre énormément d’énergie à la vente. Il vend majoritairement en local. Vous pouvez pour autant, retrouver ses vins à l’étranger. Il exporte principalement en Europe, notamment en France, en Belgique et au Luxembourg.

Ses vins ?

Henri ne conçoit pas les vins sans tension. C’est d’ailleurs ce qui m’a sauté à la bouche lors de la dégustation. Il le dit lui-même, il n’aime pas les vins avec de la sur-extraction et préfère la fraîcheur. Il fait généralement des macérations pré-fermentaires à froid pour les vins rouges pour apporter du fruit et de la complexité.

Les 3/4 de son vignoble sont constitués de spécialités. C’est cette richesse et variété de cépages qui font la beauté de la Suisse et notamment du Valais. Il existe dans ce canton plus de 50 cépages différents sur moins de 5000 hectares de vigne. Imaginez-vous !

Henri Vallotton produit notamment un vin à base d’un cépage dont sûrement très peu d’entre vous en ont entendu parlé : la Durize. Quesaquo me diriez-vous?

Il s’agit d’un cépage noir autochtone, que l’on retrouve uniquement à Fully, appelé aussi familièrement Vieux Rouge de Fully.

Le père d’Henri a remis ce cépage au goût du jour dans les années 80. Apparenté au Roussin d’origine valdôtain et au Rouge du Pays, très peu de caves en produisent. Il a failli disparaître pendant la crise du phylloxera. Ce cépage confidentiel est souvent décrié car productif les premières années,il met beaucoup de temps à mûrir. Capricieux, Henri le connaît bien aujourd’hui! Plus léger et plus subtil que le Cornalin.

Aujourd’hui, Henri possède 4000m sur le terroir de la Combe d’enfer. Convaincu, il ne souhaite pas enterrer ce cépage autochtone et souhaite surtout garder une trace du passée.

A la dégustation, on ressent la fraîcheur et toute la subtilité de ce vin. Il s’ouvre sur des arômes de fruits mûrs et continue sur des arômes plus sauvages et complexes, de sous-bois, de poivre et de pruneaux . Souple et velouté, il nous accompagne avec une finale légèrement vanillée.

Ma fournée de recommandation avec les vins qui m’ont marqué :

Le Sauvignon, un cépage que Henri a découvert lors de belles rencontres vigneronnes et qu’il affectionne particulièrement. Il n’a rien à envier au vin de Loire.
Planté sur du schiste, on retrouve des notes de silex, mais aussi des arômes de bourgeon de cassis, caractéristique du cépage. Une belle tension accompagne des notes d’agrumes et de fruits exotiques. On se laisse porter par cette belle finale tout en tension et légèrement vanillé, qui vous prend par la main pour ne plus vous lâcher.
En ce moment, vous pouvez retrouver à la vente le Sauvignon Blanc 2016, même si j’ai eu la chance de découvrir le 2017. J’ai pu découvrir ces deux millésimes différents et avoir une belle vision de l’effet millésime sur le cépage.

Le K blanc, un assemblage de Sauvignon 2018 en barrique et de Païen 2019 en cuve.Surprenant, il mixe deux millésimes différents pour créer cette nouvelle cuvée. On adore !
On se laisse guider par un nez d’une belle richesse aromatique, frais et vif. La patte du vigneron est bien là ! Cette cuvée fait partie de la nouvelle gamme du domaine sorti fin novembre: une gamme intermédiaire qui oscille entre 15 et 28 CHF. Ce sont des vins de plaisir à la fois complexes et cool. Ce K blanc va vous mettre de bonne humeur !

Ça vous dit de tester ?

Pour la visite c’est par ici :

Adresse:
Cave Henri Valloton

Chemin des Marètsons 1
1926 Fully

Instagram: @cave_henri_valloton

MW