Interview de Simon Ribert du Domaine Strateus à Madiran

Cette semaine, parlons viticulture avec le domaine Stratéus à Madiran. Une chouette journée commence lorsque tu te laisses surprendre, vous ne pensez pas ? Je ne suis pas une grande amoureuse des vins doucereux et pourtant… j’ai eu un coup de cœur pour la cuvée Neolithik de ce domaine, un assemblage de Petit et Gros Manseng en appellation Pacherenc Du Vic-Bilh. 

Dans un entretien, j’ai eu la chance de discuter avec Simon Ribert, le jeune vigneron et éleveur qui se cache derrière ses cuvées. Voici mon interview et vous verrez que c’est dans les détails que l’on fait de beaux raisins.

Moi. Peux-tu nous présenter le domaine et ta philosophie en quelques lignes?

Simon Ribert. Strateus est un petit domaine. J’ai commencé en 2014 avec 0,9ha de vieux Tannat et de vieux Cabernet-Franc laissé par mon grand-père. J’ai planté par la suite 2ha de Petit et Gros Manseng en sélection parcellaire. J’ai pour cela sélectionné des cépages spécifiques en fonction du Terroir. Je souhaitais faire des blancs avec une belle acidité. C’est pourquoi j’ai choisi des sols d’argiles rouges qui ont tendance à garder l’eau l’été et à augmenter le degré d’alcool.

À ce jour, 12ha sont travaillés en bio et biodynamie et nous sommes en conversion biologique. Nous avons trois Terroirs différents: des sols de gros galets de l’Adour (fleuve du Sud-Ouest) plutôt argileux où l’on retrouve aussi quelques oxydes de fer, des sols de gravettes argilo-limoneuses et des sols argilo-calcaires.

Je suis quelqu’un d’assez cérébral avec 50 idées à la minute. Ma première volonté est de m’approcher le plus possible d’un équilibre entre l’animal et le végétal tout en diminuant l’impact de l’homme. C’est une connaissance approfondie de ce métier qui me permettra de tendre vers cet objectif.

Moi. D’où vient cette passion pour l’agronomie et le végétal?

Simon Ribert. J’ai fait un parcours scolaire tourné vers le végétal suivi d’un BTS viticulture-oenologie. Ce qui m’attire, c’est l’appréhension d’une connaissance en perpétuel mouvement qui amène à un rapport humble de ce métier de vigneron. Il y a tout un aspect spirituel et délicat dans ce travail. Si tu comprends cette phrase pour moi alors tu as tout compris: «  Une mesure sans mesure d’incertitude est une mesure irresponsable. » Cela nous remet à notre place très clairement.

Moi. Qu’est ce qui t’a poussé à te lancer dans cette nouvelle aventure ? Quel a été le déclic?

Simon Ribert. Mon grand-père, autodidacte à sa façon, m’a permis d’appréhender ce métier d’une façon à la fois pédagogique mais aussi assez comportementale. En effet, il m’a permis de comprendre ce qu’était l’humilité au travers de cet univers si passionnant et ma faim de savoir n’est jamais rassasiée avec ce métier.

Moi. Tu penses Terroir avant rentabilité , n’as-tu pas peur des risques?

Simon Ribert. En effet, c’est ce qui me motive, dans le sens où je pousse le vice dans tous les travaux viticoles. Je souhaite expérimenter les multiples facettes et le potentiel du Terroir (cépage, sol, exposition, altitude, rendement et intervention vigneronne) afin d’en sortir le meilleur nectar possible, en tenant compte bien-sûr du millésime. En résumé, je mets au centre l’adaptation de l’homme sur une année au travers d’un lieu: le Terroir.

Après tout dépend ce que l’on entend par rentabilité. Il existe aussi une rentabilité sociale et humaine que je ne néglige pas. La Terre ne nous appartient pas, on est là pour semer une graine. Je suis agriculteur avant tout autre chose.

Moi. Quelle est ta routine ?

Simon Ribert. J’ai une routine assez simpliste: être le plus présent possible à la vigne, de façon à augmenter la précision de l’intervention.

Moi. Quels sont tes vignerons de référence?

Simon Ribert. Je pense à : Julien Ditte dans le pays catalan, Henri Jayer en Bourgogne, Thibaud Boudignon en Anjou, Louis Dagueneau et Les Jardins de Babylone dans le Sud-Ouest , Michel Chevré et le Clos de l’Ecotard à Saumur, Loïc Pasquet avec la cuvée Liber Patter à Bordeaux, Domaine Léon Barral à Faugère.

Moi. Le meilleur conseil que tu aies reçu ?

Simon Ribert. « Les vins se gouttent comme leur nom se dit. » Je trouve ça poétique et je vois cela comme une note de musique.

Moi. Quel est ton geste écolo ?

Simon Ribert. J’agis de différentes manières:

• Nettoyage hivernal des parcelles par nos animaux pendant 4 à 5 mois (boeuf Angus et brebis solognote).
• Tressage pour ne pas rogner la vigne et pour diminuer mon impact carbone
• Mise en place de ruches dans les vignes
• Création de refuge à insectes
• Sélection d’une flore locale en guise d’agroforesterie personnalisée sur notre exploitation

Moi. Quels sont tes projets pour 2022_2023 ?

Simon Ribert. J’ai plusieurs projets à venir dont l’utilisation de la traction animale réalisée par un prestataire Gilles Fougerouse afin de lutter contre les dégagements de carbone et ainsi renouer l’équilibre animal/végétal.

Une nouvelle cuvée va voir le jour: Neolithik rouge, en appellation Madiran. Il s’agit d’un assemblage de Cabernet et de Tannat, issu d’affleurement calcaire ce qui donne énormément de matière et un côté crayeux au vin. Ces vignes ont été un vrai challenge. Quand je les ai eu c’était vraiment des vignes livrées à elles-même et il m’a fallu énormément d’énergie pour les rééquilibrer. C’est ça qui donne un sens à mon travail !

Mon frère est rentré aussi dans la société, il y a tout juste quelques mois, même s’il m’aidait déjà depuis quelques années. Il apporte un vrai plus au niveau de la partie animale. Nous souhaitons mettre en place des croisements entre nos vaches Angus et un futur taureau Wagyu (Viande de Kobe) que nous aimerions acquérir afin de proposer des viandes d’une belle qualité toujours dans cette même recherche d’excellence qu’à la vigne.

Vous l’aurez compris, Simon est un jeune vigneron avec une vision bien précise du travail à la vigne où le Terroir et la nature prennent tout leur sens. J’aime beaucoup les valeurs que Simon défend et cela se ressent dans les vins qu’il produit.

Pour en savoir plus, n’hésitez pas à le suivre sur les réseaux sociaux.

Ça vous a donné envie de déguster ? 

Adresse:
Domaine Strateus – Madiran

7, imp. Congalinon
65700 Madiran – France

Instagram: @strateusstrateus

Facebook: @strateus.strateus

MW