Le surprenant Dézaley Grand Cru de Lavaux avec le domaine des Frères Dubois à Cully

Connaissez-vous le Terroir du Dézaley ?
Ce vignoble surplombant le lac est né il y a de ça 800 ans. Rien que ça ! Plongez ici afin d’en apprendre davantage avec le Domaine des Frères Dubois.

Comme vous le savez certainement, Lavaux est classé au patrimoine mondial de l’Unesco depuis 2007 et parmi les Terroirs les plus mythiques se cache le fameux Grand Cru du Dézaley. En un claquement de doigts… On oublie tout et on se laisse porter par ce décor sur fond de carte postale avec ses 10’000 terrasses, son ciel bleu, son soleil se reflétant dans le Léman et en arrière-plan les montagnes des Alpes. En attendant que vous puissiez vous y rendre, je vous partage quelques photos.

Le terroir du Dézaley est bien connu pour ses pentes abruptes pouvant aller jusqu’à 100% d’inclinaison. Exposé idéalement sud/sud-ouest, son sol se compose de calcaire, de molasse marneuse et de poudingue datant entre vingt et trente millions d’années. Moins riche en moraines que les autres appellations, cette zone particulière a été moins exposée au retrait du glacier du Rhône, bloqué par l’épaule rocheuse du village de Rivaz. 

Il faudra attendre 2013 pour que l’Etat de Vaud accorde au Dézaley et au Calamin l’«AOC Grand Cru».

Et bien, c’est ici dans cette merveilleuse région que le domaine des Frères Dubois a vu le jour. Aujourd’hui situé au cœur du village de Cully, je suis allée à la rencontre de Frédéric et Grégoire, la 4e génération qui m’ont gentiment ouvert les portes dans leur magnifique domaine du Petit Versailles. Inspirant ! 

Édifiée en 1836 après la domination bernoise du Canton de Vaud, cette bâtisse de style français, impose son caractère et son histoire. C’est ici que Grégoire et Frédéric ont grandi et que leur père leur a transmis sa passion. Aujourd’hui, ils n’y vivent plus mais elle abrite encore les caves du domaine. En poussant la porte, j’y ai découvert un mélange entre tradition et modernité avec de vieux foudres de plus de 100 ans pour certains qui servent à l’élevage de leur fameux Chasselas mais aussi une autre cave avec des cuves émaillées en sous-sol. Vous retrouverez aussi une vinothèque, les bureaux administratifs et une salle de réception. 

Une histoire et une passion familiale qui se transmet au fil des générations. L’histoire ne donne pas tous les détails mais cela commence en 1927 quand leur arrière-grand-père rachète le domaine de la Tour de Marsens. Il faudra attendre l’arrivée du grand-père de Grégoire et Frédéric pour voir apparaître les premières bouteilles en 1947. Dites-vous qu’il avait tout juste 19 ans à cette époque ! Après une année, son frère l’a rejoint sur l’exploitation ce qui a donné le nom officiel « Les Frères Dubois ».

Depuis 2005, c’est Frédéric et Grégoire qui sont aux manettes de ce domaine de 22 hectares. Ils peuvent d’ailleurs compter sur leurs épouses respectives pour les épauler. Frédéric et sa femme Séverine gèrent plutôt les travaux de vigne et de cave tandis que Grégoire et Carla, la partie administrative et commerciale.

Une évidence pour les deux frères qui ont toujours eu un lien très fort avec la cave. Une vision de transmission aux générations futures d’un lieu privilégié et respectueux de leur valeur est bien présente. Pour tout vous dire, la relève est déjà assurée puisque les enfants de Grégoire sont intéressés : Quentin les a rejoint l’année passée au bureau pour la communication et l’administratif tandis que sa sœur Emma vient de finir sa formation de caviste. Elle va aller travailler à l’étranger pour enrichir ses connaissances pour ensuite les rejoindre.

Un seul maître-mot aujourd’hui: l’exigence, afin de produire de grands vins aptes au vieillissement valorisant leur vignoble. Leur Terroir en est le fier joyau. 

Sur les 35 références, 80% de leur production est faite à partir de Chasselas. Lavaux étant une mosaïque géologique, cela leur permet de produire des vins avec des caractères distincts et de montrer l’étendue de leur savoir-faire. Cépage phare de l’appellation Dézalzey et le plus représenté en Suisse, le Chasselas est un subtil révélateur de Terroir avec un caractère minéral pouvant être très marqué.

Originaire du bord du lac Léman, il a longtemps été dénigré alors qu’il peut faire de très jolis vins de garde. C’est d’ailleurs pour démontrer l’excellence des vins à base de Chasselas que l’association de la « Baronnie du Dézaley » a été créée. Le domaine Dubois fait partie des membres fondateurs de cette dernière. Selon les Terroirs du Dezaley, le Chasselas peut s’exprimer sur le fruit, la finesse ou encore la minéralité. Avez-vous vu du Chasselas aussi bien vieillir qu’à Lavaux?

Les Frères Dubois l’ont bien compris : rien de mieux pour cela que la micro-oxygénation ! Les foudres leur permettent de faire ressortir toutes les subtilités  de ce cépage. L’idée n’étant pas d’apporter du bois, les vinifications se font au domaine d’abord en cuve et c’est seulement sur la phase d’élevage que les vins passent en foudre; propice au développement des arômes tertiaires.

J’ai tenté de percer leur secret en faisant une dégustation de vieux millésimes. Je vous le conseille: une bonne idée afin de voyager à travers le temps et découvrir leur savoir-faire. Les Cuvées « La Braise d’enfer » et « le Dézaley-Marsens » en sont de fiers représentants. Le Dézaley-Marsens faisant référence aux vignes attenantes à la Tour de Marsens dont la construction date du XIIe siècle.

On n’y pense pas forcément mais les murs de pierre sont la clé de voûte de ce vignoble ! Que serait Lavaux sans ses terrasses ?

Façonnés par l’homme, les murs ont pour rôle de maintenir la terre et de rendre la viticulture possible sur ces pentes abruptes. À première vue, on les penserait en pierre sèche, en réalité, ils sont faits avec un mortier de chaux méthode utilisé depuis le Moyen-Âge. Leur entretien exige un immense savoir-faire. Un boulot de dingue bien-sûr mais aussi un investissement financier conséquent afin de faire perdurer le vignoble dans le temps ! Les Frères Dubois le savent et c’est dans ce respect de la nature et de leurs Terroirs qu’ils travaillent leurs vignes.

Grégoire m’a représenté Lavaux avec une belle image: comme étant la région des trois soleils : l’astre, les murs de pierre qui emmagasinent et réchauffent la vigne durant la nuit et le lac Léman qui a un effet miroir et réverbère la lumière sur le vignoble. Qu’en pensez-vous ?

Côté vigne, tout est manuel. Les vendanges se font à la main en petites caissettes ce qui permet de faire un tri directement à la vigne. Le domaine travaille le vignoble avec des produits biologiques. Aujourd’hui non labellisé car la problématique propre au Lavaux reste l’enherbement qui est compliqué à mécaniser. Des tests sont réalisés dans certaines vignes avec des semences de plantes pérennes sous les ceps pour palier à ce problème.

Côté vin, difficile de choisir ! J’ai néanmoins craqué sur plusieurs de leurs vins :

La Cuvée La Braise d’enfer fait partie des vins emblématiques du domaine avec le Dézaley. On retrouve sur l’étiquette historique, créé par leur grand-père, deux petits diables autour d’une grappe de raisin. Les vins d’Epesses sont issus de Terroir argilo-calcaire qui donnent des Chasselas racés marqués par la minéralité. Pour représenter cela, son grand-père souhaitait une étiquette y faisant référence. Les petits diables sont donc un clin d’oeil au petit ruisseau nommé « Rio de l’enfer » qui passe au coeur du village d’Epesses et qui descend jusqu’au lac ( En patois vaudois, Rio signifie ruisseau) et à une vieille légende associée au village faisant référence au glissement de terrain. On raconte que le village aurait glissé en une nuit d’une centaine de mètres et que le diable en serait la cause.

Vinifié en cuve inox puis élevé pendant 4 à 6 mois en foudre, cela donne un vin à la fois avec une belle fraîcheur et une grande complexité. Sur ce millésime 2021, on retrouve des nuances d’agrumes, de zeste de citron vert, de tilleul et d’amande grillée. Charnu en bouche, ce Chasselas est imprégné par son Terroir. On y découvre une minéralité marquée par des notes de silex. La finale est rehaussée par une jolie amertume. Un vin pour toute occasion.

Je fonds pour le Dézaley-Marsens Grand Cru – Vase N°4, millésime 2018. Issu de vigne de plus 40 ans d’âge, le Vase N°4 est une réserve spéciale qui jouit d’un élevage à l’ancienne prolongé en cave et sur fines lies. Il s’agit d’une « spécialité » Dubois mise en bouteille bien plus tard encore que la recommandation Baronnie soit après 18 mois en moyenne. Effectivement, selon la Charte de qualité de la Baronnie du Dézaley, les vins ne peuvent pas être commercialisé avant le 1er septembre de l’année qui suit la récolte, soit avec un élevage de 12 mois, afin d’obtenir l’appellation Grand Cru du Dézaley.

On découvre un Chasselas d’une plus grande complexité. Issu de Terroir riche en calcaire, il aura besoin de plus de temps pour s’ouvrir contrairement à la cuvée Braise d’Enfer.
Flatteur au nez, il s’ouvre sur une belle palette aromatique qui évoque les fruits exotiques, le miel, la noisette et les fruits confits. D’une belle complexité en bouche, on retrouve toute la puissance et l’amplitude du Dézaley avec un peu de maturité. Chaleureux et fruité, il s’accompagne d’une profondeur et d’une remarquable persistance, auquel vient s’ajouter une pointe de minéralité.

La cuvée « L’Alizarine » est un 100% Gamaret. Cépage vigoureux et peu sensible aux maladies cryptogamiques, il a été créé en 1970 à Changins en Suisse. Ce croisement entre du Gamay et du Reichensteiner, un cépage blanc allemand, donne des vins à la fois structurés et colorés. Le nom de la cuvée fait référence au pigment rouge extrait de la racine de la garance qui servait autrefois à la teinture de textile et faisant un clin d’œil à la couleur du vin.

Son nez à la fois complexe et intense exhale des arômes de fruits rouges et noirs mûrs tels que le cassis, la confiture de mûres, ainsi que des notes vanillées et épicées. En bouche, il s’exprime sur la générosité avec des tanins soyeux. Souple et doté d’une belle concentration, il reste bien équilibré. Il ne sera que meilleur si on le garde un peu en cave. Le tout donne une finale persistante.

La cuvée Réserve Blanche du Château de Glérolles se situe sur l’aire d’appellation Saint-Saphorin. Ce domaine vient s’ajouter aux références en 2016, date depuis laquelle ils travaillent les vignes, vinifient et commercialisent les vins du Château.

On se laisse porter par un nez délicat à la fois floral et fruité. La bouche élégante offre une belle minéralité. Le milieu de bouche exprime l’amplitude et l’onctuosité des beaux Chasselas. Ce vin se termine sur une finale longue et élégante.

N’hésitez pas à vous y rendre à Cully pour profiter de leur vinothèque, créée en 2010. Le lieu rappelle les murs des vignes et vous pourrez y observer des photographies du domaine de la Tour de Marsens qui vous plongeront dans leurs vignobles, un verre à la main. Le point de chute idéal pour découvrir Lavaux.

En plus, pour les amateurs de vieux millésimes, ils ont une collection de vieux Chasselas qui en feront jalouser plus d’un ! Mais chut, c’est pas moi qui vous l’ai dit !

Adresse:
Les Frères Dubois
Chem. de Versailles 1
1096 Cully – Suisse

Instagram: @les_freres_dubois

Facebook: @lesfreresdubois.ch

MW